Le droit de se taire à l'audience pénale. Origines et droit positif.
Le droit de se taire en France vient du droit européen.
Cependant il n’est pas écrit dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et découle des articles 47 et 48 relatifs aux droits de la défense.
Il n’est pas non plus prévu par la Convention européenne, il découle de son article 6 qui garantit un procès équitable. Pour autant, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme fait régulièrement mention de ce droit. Selon la Cour, « le droit de se taire garantit que l’accusation ne fonde pas son argumentaire sur des éléments de preuve obtenus par la contrainte ou la pression » (CEDH 17 déc. 1996 Saunders c. RU §68).
Aujourd’hui le droit de se taire en droit Français est expressément prévu par les textes à chaque étape de la procédure pénale.
Le Conseil Constitutionnel a conféré une valeur constitutionnelle au droit de se taire en 2016 (Cons. const. 9 avr. 2021, n° 2021-895/901/902/903 QPC).
Il a ainsi eu à se prononcer plusieurs fois sur la notification du droit au silence en 2021. Cette récurrence du sujet a poussé le législateur à ajouter un alinéa à l’article préliminaire du Code de procédure pénale par la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire :
« En matière de crime ou de délit, le droit de se taire sur les faits qui lui sont reprochés est notifié à toute personne suspectée ou poursuivie avant tout recueil de ses observations et avant tout interrogatoire, y compris pour obtenir des renseignements sur sa personnalité ou pour prononcer une mesure de sûreté, lors de sa première présentation devant un service d'enquête, un magistrat, une juridiction ou toute personne ou tout service mandaté par l'autorité judiciaire. Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations faites sans que ledit droit ait été notifié. ».
Pendant une audience, ce droit est garanti par l’article 406 du Code de procédure pénale qui dispose :
« Le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, après avoir, s'il y a lieu, informé le prévenu de son droit d'être assisté par un interprète, constate son identité et donne connaissance de l'acte qui a saisi le tribunal. Il informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. Il constate aussi s'il y a lieu la présence ou l'absence de la personne civilement responsable, de la partie civile, des témoins, des experts et des interprètes. ».
Ainsi, quand la notification n’a tout simplement pas lieu, la nullité est acquise car les intérêts du prévenu sont atteints (Cass Crim 8 juillet 2015).
La jurisprudence de la Cour de Cassation a par la suite encadré plus précisément la notification du droit au silence lors de l’audience.
En effet, le moment de la notification est important.
« Selon l'article 406 du code de procédure pénale, le président ou l'un des assesseurs par lui désigné, après avoir constaté son identité et donné connaissance de l'acte qui a saisi le tribunal correctionnel, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.(…)En cas de notification tardive, cette atteinte est également caractérisée lorsque le prévenu prend la parole avant d'avoir reçu cet avertissement. » (Cour de cassation crim 23 novembre 2021 n° 20-80.675).
On en déduit que la notification peut être tardive sans être une cause de nullité à condition que le prévenu n’ait pas parlé.
La Cour de cassation a également précisé que la notification n’avait pas à être faite de manière distincte et individuelle aux différents prévenus (Crim cass 27 juin 2018).
Pour résumer, si le prévenu s’exprime avant qu’on ne lui ait notifié son droit de se taire, le droit au silence étant un élément clé des droits de la défense, la nullité peut être invoquée.
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