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Droit Pénal : De la publicité des propos injurieux ou racistes : de la Cour de l’immeuble à la Cour de Cassation…

14/05/2014
Droit Pénal : De la publicité des propos injurieux ou racistes : de la Cour de l’immeuble à la Cour de Cassation…
La volonté de rendre publics les propos injurieux peut suffire à constituer le délit.

Publicité des propos injurieux ou racistes : de la Cour de l’immeuble à la Cour de Cassation…

Lorsque les rapports entre voisins se tendent les mots peuvent dépasser les pensées.

Pour autant, la colère n’excuse pas tout, et encore moins les injures à caractère raciste ; dans le cas qui a été tranché par cet arrêt de la Cour de Cassation, on note également que le prévenu avait par ailleurs déjà été poursuivi et condamné pour des faits de même nature.

Les propos tenus par le prévenu sont les suivants : « sale bougnoule, vous êtes juste tolérés ici ».

Regardons en quoi ces propos sont condamnables (au sens légal, car du point de vue moral, cela va sans dire).

L’article R.624-3 du Code pénal dispose : « La diffamation non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée est punie de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe.

Est punie de la même peine la diffamation non publique commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap ».

Il s’agit donc là de propos non publics, et constitutifs d’une contravention.


Mais si les propos injurieux sont publics, c’est le régime du délit qui s’impose. Et s’agissant d’une atteinte à la liberté d’expression, elle est régie par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui définit :

  • Dans son article 29 le concept d’injure publique : « Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure ».

 

  • Dans son article 33 le concept d’injure discriminante : « L'injure commise par les mêmes moyens envers les corps ou les personnes désignés par les articles 30 et 31 de la présente loi sera punie d'une amende de 12 000 euros.

 

L'injure commise de la même manière envers les particuliers, lorsqu'elle n'aura pas été précédée de provocations, sera punie d'une amende de 12 000 euros.   Sera punie de six mois d'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende l'injure commise, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.   Sera punie des peines prévues à l'alinéa précédent l'injure commise dans les mêmes conditions envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap ».

 

Nous savons donc désormais que l’injure raciale est un délit puni d’une peine d’emprisonnement et d’amende.

 

Mais quelle est la particularité de cet arrêt ?

Les propos tenus par le prévenu ne sont pas contestés, seul leur caractère public l’est.

En effet, ils ont été tenus dans la cour intérieure d’un immeuble ; l’Avocat du prévenu fait alors valoir que cette cour intérieure est un espace privé ; l’injure n’étant pas publique, il s’agit dès lors d’une contravention, ne pouvant entraîner la peine de deux mois d’emprisonnement à laquelle son client a été condamné.

Mais la Cour de Cassation tranche dans le même sens que la Cour d'Appel de Colmar : les propos ayant «été tenus dans une cour d'immeuble qui comporte seize appartements et à laquelle le public avait libre accès, suffisamment fort pour être entendus par le public » suffit, même « sans relever aucun témoignage de ces propos émanant de tiers étrangers à la copropriété, ni même simplement de tiers étrangers à la famille » [de la victime]...membre de la copropriété, « les propos litigieux ont été tenus dans des circonstances traduisant une volonté de leur auteur de les rendre publics ».

Les propos tenus dans la cour de l’immeuble ont été retenus par la Cour de Cassation, qui semble mettre l’accent sur la volonté de rendre publics les propos, et non pas les moyens ou le résultat de celle-ci.

 

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